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Le boum des vaccins

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Photo: Yay Media As/Alamy Stock Photo

Pendant sa première grossesse, Élisabeth Simard, jeune professionnelle de Québec, a beaucoup lu sur les vaccins. « On entend tellement parler les gens qui sont contre ! » dit-elle. La future maman a rapidement été convaincue du bien-fondé de cette technique de prévention plus que bicen­tenaire, dont on a démontré à maintes reprises qu’elle cons­titue un des meilleurs moyens d’améliorer à bas coût et à moindre risque la santé des populations.

Aujourd’hui, ses deux garçons, Henri, deux ans et demi, et Paul, 13 mois, ont reçu toutes les injections prévues au calendrier établi par le ministère de la Santé du Québec. « Ce n’est pas vrai que les vaccins ne servent plus à rien, et c’est égoïste de ne pas y recourir, car on met en danger les petits qui n’ont pas encore reçu toutes les doses ! » dit Élisabeth, que le retour de la rougeole au Québec, l’hiver dernier, incite à la prudence.

16maladiesDébut 2015, une étude de l’Institut national de santé publique du Québec a montré que, comme Élisabeth Simard, 90 % des parents jugent les vaccins sûrs et utiles. Dans les prochaines années, ils protégeront davantage de gens contre davantage de maladies.

Les ventes de vaccins dans le monde augmentent de plus de 10 % par an, et ont atteint 33 milliards de dollars en 2014. Dans les pays riches, les autorités publiques financent de plus en plus de campagnes de vaccination, surtout pour les enfants. Depuis 2004, une demi-douzaine de vaccins se sont ajoutés au programme québécois d’immunisation, qui protège désormais contre 16 maladies infectieuses. « D’autres sont à l’étude, comme celui contre le zona, destiné aux personnes âgées », explique la Dre Maryse Guay, professeure à l’Université de Sherbrooke et membre du Comité sur l’immunisation du Québec.

De nouvelles versions des vaccins courants sont régulièrement homologuées par le ministère de la Santé du Canada. Celui qui est actuellement inoculé aux petits Québécois pour combattre le pneumocoque, par exemple, protège contre 13 souches du virus, au lieu de 7, comme le faisait le précédent. Et depuis l’an dernier, les enfants n’ont plus à craindre la piqûre pour être protégés con­tre la grippe, puisque le vaccin est administré au moyen d’un vaporisateur nasal. Et ça fonctionne… même si le nez est bouché !

Dans les pays en développement, le taux de vaccination croît aussi, surtout grâce à la création de l’Alliance GAVI, un partenariat public-privé mondial né en 2000 sous l’impulsion de la fondation Bill et Melinda Gates.

Et la science continue d’avancer en laboratoire. « On a beaucoup progressé dans la compréhension de l’immunité depuis 10 ans, ce qui a ouvert de nouvelles pistes de recherche », explique Denis Leclerc, du Centre de recherche en infectiologie de l’Université Laval. Avec des produits dits « adjuvants », qui stimulent la réaction du système immunitaire, on espère pouvoir prévenir de plus en plus de maladies infectieuses fréquentes, du VIH aux intoxications alimentaires causées par E. coli en passant par l’herpès, la bactérie « mangeuse de chair », la maladie de Lyme ou la chlamydiose. Signe des temps, cette année, un premier vaccin contre le paludisme — qui tue un demi-million de personnes chaque année — a été approuvé. Après plus de 30 ans de recherche !

Les méthodes de fabrication, qui n’avaient guère évolué depuis des décennies, sont en voie de changer. Cette année, la société québécoise Medicago a démarré la cons­truction d’une usine révolutionnaire à Québec. En utilisant des plantes comme une sorte d’incubateur, elle pourra y fabriquer des vaccins contre la grippe beaucoup plus rapidement que par la méthode traditionnelle, où le virus est multiplié dans des œufs. De quoi gagner plusieurs mois advenant une pandémie.

Tout n’est pas rose pour autant, car la vaccination reste un art délicat. Environ 93 % des vaccins testés sur l’humain ne verront jamais le jour et ceux qui parviennent au stade commercial ne sont pas toujours des panacées. Par exemple, le vaccin thérapeutique contre le cancer de la prostate Provenge, qui coûte environ 100 000 dollars, ne prolonge la vie que de quelques mois seulement. Quant à l’efficacité du vaccin contre le paludisme, elle n’est que de 56 % et elle diminue après un an.

Le modèle même de création des vaccins est à revoir, croient de nom­breux experts. Au Canada comme ailleurs, les scientifiques reçoivent du financement pour les premiers stades de leurs recherches en laboratoire, alors que les sociétés pharmaceutiques ne s’engagent pas tant que le vaccin n’est pas suffisamment au point et que le marché n’est pas assez vaste pour permettre de compenser le risque. Ces dernières étapes, qui reviennent aux sociétés pharmaceutiques, coûtent de 500 millions à un milliard de dollars, tant les études pour prouver l’efficacité et l’innocuité sont complexes.

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L’épidémie d’Ebola a fait 11 000 morts en 2014-2015 avant qu’on mette au point un vaccin efficace à 100 %. (Photo: J. Moore/Getty Images)

Entre la recherche initiale et les derniers stades de développement, les vaccins traversent une « vallée de la mort », mal financée, qui engloutit nombre de produits prometteurs. Quand l’épidémie d’Ebola s’est déclenchée, on disposait déjà de vaccins testés sur des animaux depuis 2009. Mais il aura fallu plus de 11 000 morts, une peur planétaire et des milliards dépensés dans l’urgence pour qu’en juillet dernier on ait la preuve que l’un d’eux pouvait être efficace chez l’humain… à 100 % !

Ce drame servira peut-être de leçon. Cet été, un groupe d’experts mené par le Dr Stanley Plotkin, une sommité qui a mis au point le vaccin contre la rubéole dans les années 1960, a proposé la création d’un Fonds mondial pour la vaccination, financé par les États, fondations et entreprises, destiné à combler le vide entre chercheurs et multinationales. L’idée fait son chemin : les huit milliards de dollars qu’a coûté l’urgence Ebola font réfléchir…

 

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Convaincre les réticents

« On fait beaucoup de cas du mouvement antivaccination, mais ce phénomène a toujours existé », estime la Dre Maryse Guay. Au Québec, en moyenne, moins de 3 % des gens sont farouchement contre les vaccins : seul un enfant sur 100 n’en a jamais reçu. Mais le quart des parents hésitent à suivre à la lettre le calendrier vaccinal. « Il faudrait davantage former au dialogue les professionnels de la santé et commencer à discuter avec les parents bien avant les échéances », dit la spécialiste. Sauf que les mythes sont presque aussi tenaces chez les médecins et les infirmières que dans la population en général ! Selon les dernières études sur les réticences à la vaccination, le fait de montrer des statistiques sur les risques et les bénéfices de l’inoculation n’a que très peu d’influence sur ceux qui hésitent, alors que présenter des histoires vécues a un effet plus important. Mais pour l’instant, les autorités de la santé publique hésitent à jouer sur les émotions… d’autant que la couverture vaccinale des petits Québécois ne cesse de s’améliorer : en 2006, 23 % des enfants d’un an avaient reçu tous leurs vaccins dans un délai d’un mois après la date recommandée, et 17 % des enfants de deux ans. En 2014, ces pourcentages ont atteint respectivement 55 % et 42 %… même si plusieurs vaccins ont été introduits entre-temps !

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